Pourquoi les livres les plus anciens de l'Ancien Testament décrivent-ils Dieu comme s'il avait un corps ?
Dans la tradition juive, il existe deux camps de pensée différents. L'un considère les passages de l'Ancien Testament qui font référence au corps de Dieu comme métaphoriques, l'autre les accepte littéralement et pense que Dieu a un corps ou, au moins, une forme qu'il peut permettre aux hommes de voir. Depuis les treize principes de la foi de Maïmonide au XIIe siècle, la pensée juive considère généralement que Dieu est incorporel.
La tradition chrétienne est pratiquement unanime pour considérer ces passages dans un contexte métaphorique (voir Jean 1,18). Toute référence au corps de Dieu est considérée comme un moyen symbolique de rendre les actions de Dieu plus compréhensibles pour les êtres humains vivant dans un monde matériel.
Saint Thomas dira :
« La Sainte Écriture nous livre les choses divines et spirituelles sous le voile de similitudes empruntées aux choses corporelles. Aussi, lorsqu’elle attribue à Dieu les trois dimensions, elle désigne, sous la similitude d’une quantité corporelle, la quantité de sa puissance. Ainsi la profondeur symbolise la puissance de connaître les choses cachées ; la hauteur, la supériorité de sa puissance ; la longueur, la durée de son existence ; la largeur, l’efficacité de son amour pour toutes choses. [...] Dans l’Écriture, des membres sont attribués à Dieu en raison de leur action, selon une certaine similitude. Ainsi, l’acte de l’œil est de voir : aussi attribue-t-on des yeux à Dieu pour signifier sa capacité de voir par l’intelligence, non par les sens. Et de même pour les autres membres. Des positions ne sont attribuées à Dieu que par métaphore : on dit qu’il est assis à cause de son immutabilité et de son autorité ; et debout à cause de sa force pour vaincre tous ses adversaires. On ne s’approche pas de Dieu par une démarche corporelle, puisqu’il est partout, mais par les sentiments de l’âme, et l’on s’éloigne de lui de la même façon. Ainsi l’approche ou l’éloignement, sous la similitude du mouvement local, désigne une démarche spirituelle. »
Exode 33,23 et 33,11 sont le plus souvent cités comme des exemples de Dieu ayant une forme, mais ils doivent être considérés dans leur contexte global.
Bien que l'Exode rapporte que Moïse a parlé à Dieu « face à face » (Exode 33,11), nous lisons également quelques versets plus loin que personne ne peut voir la « face » de Dieu et vivre (33,20). Il s'agit donc clairement d'une expression métaphorique.
Dieu dit bien qu'il laissera Moïse voir son « dos » (33,23), mais c'est en réponse à la demande de Moïse de voir la gloire de Dieu (Exode 23,18). Ceci est compris comme le fait que Dieu voile d'une certaine manière son essence à Moïse, mais qu'il se révèle dans une certaine mesure à Moïse.
Dans les passages des prophètes où ils affirment avoir vu Dieu sur son trône et où ces descriptions semblent tout à fait humaines, il s'agit de visions destinées à aider le prophète à comprendre et non d'une véritable vision de l'essence divine.